Olivier ROMAND , Pierre Loup CORBIER, Jules FRANZIN et Léonie FUHRER Ostéopathe Nancy
34 rue saint jean 54000 Nancy
Le café est l’une des boissons les plus consommées dans le monde. Riche en arômes, en antioxydants et bien sûr en caféine, il est apprécié pour ses effets stimulants, son goût et ses rituels sociaux. Pourtant, malgré sa popularité, il est souvent accusé de nombreux maux. Parmi eux, l’idée que le café acidifie l’organisme est largement répandue, surtout dans les milieux liés au bien-être, à la naturopathie ou à certaines approches de santé alternative.
Mais que signifie réellement "acidifier l’organisme" ? Le café est-il réellement en cause ? Que dit la science ? Et quelles implications cela peut-il avoir pour notre santé, en particulier pour les personnes sensibles, les sportifs ou les patients souffrant de troubles musculo-squelettiques ou digestifs ?
Cet article propose une exploration complète de la question, en croisant données physiologiques, nutritionnelles et ostéopathiques.
Le corps humain fonctionne à un pH stable, notamment celui du sang, situé autour de 7,35 à 7,45. Il s’agit d’un pH légèrement alcalin. Toute variation significative est pathologique et potentiellement mortelle. Heureusement, le corps dispose de systèmes tampons puissants (poumons, reins, tampons bicarbonates…) qui régulent ce pH en permanence.
Ce que l’on appelle « acidification de l’organisme » est donc un abus de langage. En réalité, le concept renvoie plutôt à la charge acide alimentaire et à la manière dont certains aliments influencent l’équilibre acide-base au niveau cellulaire, tissulaire ou urinaire, et non sanguin.
Le concept de balance acido-basique a été popularisé dans les années 90, notamment dans les milieux naturopathiques et végétariens. Il distingue :
Les aliments à charge acide : viande, produits laitiers, céréales, café, sucre raffiné…
Les aliments à charge basique : fruits, légumes, oléagineux, algues…
Il ne s’agit pas du pH réel de l’aliment, mais de l’effet métabolique après digestion et assimilation. Un citron est acide au goût, mais alcalinisant une fois métabolisé. À l’inverse, le café est considéré comme acidifiant, car sa combustion génère des résidus potentiellement acides (acide urique, sulfates…).
Le café est une boisson complexe, qui contient :
Caféine : stimulant du système nerveux central
Acides chlorogéniques : puissants antioxydants mais irritants
Polyphénols : protecteurs mais acides
Composés phénoliques, furannes, acrylamides (selon la torréfaction)
Minéraux : potassium, magnésium, calcium, mais en quantités modestes
Acides organiques (citrique, malique, quinique…)
Sa richesse en composés acides explique en partie son pH bas, généralement autour de 4,85 à 5,10 (donc acide).
Le café stimule la sécrétion d’acide gastrique (HCl).
Il peut irriter la muqueuse gastrique chez certaines personnes, provoquant brûlures ou reflux.
Il agit comme un laxatif léger, stimulant le péristaltisme.
Il peut altérer la perméabilité intestinale s’il est consommé en excès.
Ainsi, le café a une action acidifiante locale (estomac, intestin), mais cela ne signifie pas forcément une acidification générale du corps.
L’indice PRAL est une mesure utilisée pour estimer la charge acide d’un aliment en fonction de ses effets métaboliques et de l’excrétion rénale nécessaire pour l’éliminer.
Un PRAL positif indique un aliment acidifiant.
Un PRAL négatif indique un aliment alcalinisant.
Le café a un PRAL faiblement positif, autour de +1 à +2 mEq/100 g, ce qui en fait un aliment légèrement acidifiant.
En comparaison :
Viande rouge : +9 à +12
Fromage : +15 à +20
Légumes verts : -3 à -8
Donc, le café est loin d’être le principal responsable d’une charge acide excessive, mais sa consommation régulière, combinée à d’autres aliments acidifiants, peut contribuer à une tendance générale à l’acidose tissulaire.
Lorsque le corps métabolise certains composés du café, il produit :
Acide urique
Sulfates
Phosphates
Ces acides doivent être tamponnés par des réserves alcalines, notamment :
Bicarbonates
Minéraux alcalins comme le magnésium, calcium, potassium
Une consommation excessive de café peut donc puiser dans ces réserves, notamment osseuses et musculaires, pour maintenir l’équilibre.
Si l’acidité sanguine est maintenue constante, une acidose latente de bas grade (tissulaire) est un phénomène reconnu, lié à plusieurs troubles :
Inflammation chronique légère
Fatigue musculaire
Irritabilité nerveuse
Risque d’ostéopénie/ostéoporose (déminéralisation)
Tensions musculo-squelettiques et douleurs
Troubles digestifs
Altération de la récupération chez le sportif
Chez les personnes sensibles, une alimentation trop acidifiante (incluant un excès de café) peut donc favoriser un terrain inflammatoire, même sans pathologie déclarée.
L’ostéopathie s’intéresse non seulement à la structure, mais aussi au terrain global du patient. Le rôle de l’alimentation, du stress et du mode de vie est central dans cette approche.
En ostéopathie, un terrain "acide" peut se manifester par :
Douleurs musculaires diffuses
Tensions persistantes malgré le repos
Réduction de la mobilité articulaire
Sensibilité accrue aux efforts
Troubles du sommeil et fatigue
Maux de tête, vertiges
Le praticien cherchera à libérer les zones en restriction, mais aussi à interroger les habitudes de vie, dont la consommation de café.
Le café peut :
Perturber le sommeil et donc la récupération tissulaire
Irriter l’estomac, entraînant des troubles viscéraux influant sur la posture
Favoriser les tensions diaphragmatiques, en cas de reflux ou de stress
Contribuer à l’acidité du terrain, aggravant les douleurs chroniques
Ainsi, chez des patients douloureux, tendus, ou en fatigue chronique, la réduction du café peut améliorer les résultats des soins ostéopathiques.
Le café est reconnu pour ses effets ergogènes (amélioration des performances), notamment par :
Augmentation de la vigilance
Diminution de la perception de l’effort
Mobilisation accrue des acides gras
Il est donc couramment utilisé par les sportifs.
L’excès de café (ou caféine) peut :
Augmenter la sécrétion d’adrénaline, donc le stress oxydatif
Favoriser une perte minérale par les urines (magnésium, calcium)
Retarder la récupération s’il est pris après l’effort
Aggraver les douleurs musculaires ou les courbatures si l’organisme n’élimine pas correctement les acides
Il est donc recommandé aux sportifs de modérer la consommation de café, surtout après l’effort, et de compenser par une alimentation alcalinisante (eau riche en bicarbonates, fruits, légumes, etc.).
1 à 2 tasses par jour sont généralement bien tolérées.
Éviter de dépasser 3-4 tasses pour ne pas surcharger le système.
Choisir un café bio, de préférence en grains et fraîchement moulu.
Préférer une torréfaction légère à moyenne, moins acide que la très noire.
Éviter les cafés industriels riches en additifs ou résidus chimiques.
Le café filtre est moins irritant que l’expresso ou le café bouillu.
Éviter les capsules (aluminium, additifs).
L’ajout d’un peu de lait végétal, de collagène ou de poudre de coquille d’œuf peut réduire l’effet acidifiant.
Fruits frais (banane, melon, kiwi)
Légumes verts, jus de légumes
Eaux bicarbonatées
Tisanes alcalines (ortie, prêle, citronnelle)
Suppléments de magnésium ou de bicarbonate si besoin
Le décaféiné a un impact acide similaire, car les acides chlorogéniques et autres composés restent présents. Toutefois, il est souvent mieux toléré sur le plan digestif et nerveux.
Attention cependant à la méthode de décaféination : préférer celle à l’eau plutôt qu’aux solvants chimiques.
Le café, s’il est consommé avec modération et dans un cadre globalement sain, n’est pas un ennemi de la santé. Cependant, il reste légèrement acidifiant sur le plan métabolique, surtout s’il est pris en excès ou associé à une alimentation pauvre en fruits et légumes.
Chez certaines personnes sensibles (douleurs chroniques, troubles digestifs, fatigue, sportifs), la limitation du café peut s’avérer bénéfique, notamment pour rétablir un terrain plus alcalin et optimiser les effets d’une prise en charge globale, notamment ostéopathique.
L’important n’est pas tant d’éliminer le café que de l’intégrer avec discernement dans une hygiène de vie équilibrée. Comme souvent, c’est la dose, la qualité et le contexte qui font la différence.
Article écrit par : Olivier ROMAND , Pierre Loup CORBIER, Jules FRANZIN et Léonie FUHRER, Ostéopathe - Nancy - Tél : 0383354744Pour prendre rendez-vous ou pour toutes questions